I) DEFINITION
1) Les 5 grandes fonctions exécutives
2) Attention et Mémoire
II) LES FONCTIONS EXECUTIVES CHEZ L'ENFANT
1) Difficultés d'apprentissage et fonctions exécutives
A) Manifestations d'un manque de planification
B) Manifestations d'un manque de flexibilité
C) Manifestations d'un manque d’inhibition
2) Conseils pour aider l'enfant à développer ses fonctions exécutives
3) Développement des Fonctions exécutives chez l'enfant
III) PATHOLOGIES COMPROMETTANT LES FONCTIONS EXECUTIVES
1) Pathologies neuropsychologiques
2) Pathologies psychiatriques
3) Autres
4) Incidences des atteintes des fonctions exécutives
I) DEFINITION
« Les Fonctions Exécutives nous donnent la possibilité de jouer mentalement avec des idées, de nous adapter aux changements vite
et en souplesse, de prendre le temps de réfléchir à la prochaine étape, de résister aux tentations, de rester concentré et de
faire face à des défis nouveaux et imprévus... » (Diamond 2013)
En neuropsychologie
- Les Fonctions Exécutives sont des fonctions de haut niveau donc des fonctions de contrôle.
Elles sont impliquées dans de nombreuses formes d'activités cognitives.
- Les Fonctions exécutives ont pour finalité la réalisation d'une tâche.
Elles permettent de définir un but ou un objectif à atteindre, de mettre en place une stratégie pour y parvenir et d'effectuer
un contrôle des résultats.
1) Les 5 grandes fonctions exécutives
FLEXIBILITE |
- Flexibilté "réactive" : Il s'agit de la capacité à déplacer le focus attentionnel d'une classe de stimuli à une autre.
- Flexibilité "spontanée" : Concerne la production d'un flux d'idées ou de réponses suite à une question simple...
Cette forme de flexibilité exigerait une forme d'agilité de la pensée, une capacité à évoquer des aspects moins familiers
de la connaissance au détriment des réponses plus habituelles ou automatiques..."
|
INHIBITION |
- Capacité à empêcher que des informations non pertinentes entrent
en mémoire de travail (et donc perturbent la tâche en cours), et d'autre part de supprimer des informations précédemment
pertinentes mais qui sont devenues inutiles..."
|
PLANIFICATION |
- Ordonner une série d'étapes avec un début et une fin, afin d'aboutir à quelque chose.
|
DEDUCTION DE REGLES |
- Capacité à déduire par soi-même une règle.
|
DOUBLE TÂCHE |
- Capacité à faire 2 choses en même temps.
|
Les définitions des fonctions exécutives (grandement réduites) sont issues du GREFEX
"Fonctions Exécutives et pathologies neurologiques et psychiatriques" O.GODEFROY et le GREFEX, Ed : De boeck Solal.
2) Attention et Mémoire
A côté des fonctions exécutives, il existe deux autres grandes fonctions cognitives que sont la Mémoire et l'Attention.
Ces dernières fonctions sont étroitement liées.
A) L'attention
a) Les composantes attentionnelles
Vigilance ou alerte |
Permet l'état de réceptivité générale. |
Attention focalisée |
Capacité à percevoir des informations individuelles. |
Attention sélective |
Permet de se focaliser sur un ensemble restreint d'informations en ignorant les non pertinentes. |
Déplacement de l'attention |
Permet de suivre alternativement différentes sources d'informations. |
Attention divisée |
Permet de suivre simultanément plusieurs sources d'informations. |
b) Les systèmes attentionnels sont sous-tendus par :
- L'orientation
- La vigilance
- Les fonctions exécutives.
selon Posner (1990)
B) La Mémoire
Voir la rubrique Mémoire sur ce site avec la Mémoire de travail.
II) LES FONCTIONS EXECUTIVES CHEZ L'ENFANT
Les Fonctions exécutives ont une importance cruciale dans la réussite éducative de l’enfant.
1) Difficultés d'apprentissage et fonctions exécutives
A) Manifestations d'un manque de planification
Un manque de planification peut être assimilé ou confondu avec un manque d'initiative et de motivation, à de la paresse.
- L’élève n’arrive pas à s’engager dans une tâche,
à initier des actions vers un but, à planifier son
travail.
- Il lui arrive d’être distrait (on dit qu’il est
dans sa bulle), ou bien, il lui arrive de s’occuper
à autre chose.
- Il peut aussi déranger alors que
tous se sont mis à la tâche suite à l’explication
de l’enseignant.
Cet élève sait pourtant qu’il a
une tâche à accomplir. Il voit devant lui un
manuel, un cahier d’exercice, une règle, un
crayon, mais il ne sait pas quoi faire ni comment
s’y prendre pour coordonner tout cela.
- Il a entendu les consignes mais il n’en saisit ni le
pourquoi, ni le comment.
- Il a l’air perdu, mais ne demande pas d’aide, parce
que même le seul fait de demander de l’aide fait
partie de la planification du travail et il ne sait
pas comment l’articuler.
B) Manifestations d'un manque de flexibilité
Un manque de flexibilité cognitive peut être assimilé à de l’entêtement.
- Une nouveauté ou un changement dans la routine peut déstabiliser l’élève (déménagement, changement d’horaire,
suppléance, sortie spéciale, visite, etc).
- Une nouvelle présentation visuelle, un nouveau format peut lui faire oublier ce qu’il était capable de faire auparavant tant
il est perdu dans cette nouveauté.
- L’élève a de la difficulté à passer d’une activité à l’autre, à ranger les livres ou à en prendre d’autres,
à passer d’un sujet à un autre.
Il faut constamment le ramener dans la situation présente, car il est encore accroché au sujet précédent.
- Lorsqu’il change de tâche, il continue à produire les réponses de la tâche précédente.
- Il a de la difficulté à modifier son opinion ou sa perception d’un concept. Pour des choses simples ou plus complexes,
et même si on a des arguments évidents, il persévère.
- De même, il a de la difficulté à se corriger lorsqu’il fait une erreur. Il ne la voit pas et la
répète sans cesse, incapable de modifier son action ou sa pensée.
- Il a aussi tendance à prendre les choses au pied de la lettre : il lui est difficile de comprendre les inférences,
les sous-entendus, les blagues parce que c’est une façon nouvelle de présenter les mots, les sons, les expressions, les images
et les idées.
C) Manifestations d'un manque d’inhibition
Un manque d'inhibition se traduit par un manque de retenue des actions, du contrôle de soi, de ses pensées.
a) Au niveau du comportement relationnel
- Des comportements inappropriés selon le contexte.
- des gestes qui ne respectent pas les conventions sociales
- une attitude qui peut heurter l’interlocuteur.
b) Au niveau moteur
- C’est l’action réaction.
c) Du point de vue cognitif
- C’est la réponse toute faite à une question modèle. L’élève produit une réponse sans réfléchir et souvent inappropriée.
- Le fait de donner une réponse automatique que l’on croit être bonne sans tenir compte de tous les éléments peut
compromettre la justesse de la réponse.
- Cela peut aussi nuire à la relation avec autrui, par
l’expression de gestes inadéquats.
- Le fait de s’arrêter sur certains détails plutôt que d’avoir
une vue d’ensemble mène souvent vers une
fausse piste.
- La réponse impulsive élimine la possibilité de s’ajuster et d’adapter sa réponse ou son comportement.
- Par contre, le fait de retenir temporairement une idée éviterait de stocker de fausses informations et permettrait de
s’ajuster en cours de route, de revenir sur des informations antérieures, de faire des liens :
l’inhibition permet la flexibilité cognitive.
- La précipitation des actions et le non-respect des étapes de travail (ou de l’ordre logique) peuvent engendrer de la confusion.
2) Conseils pour aider l'enfant à développer ses fonctions exécutives
A) Favoriser toutes les situations dans lesquelles l’enfant déploie ses 3 besoins fondamentaux
- Eprouver de la joie (besoin émotionnel)
- Se sentir connecté et membre d’un groupe (besoin social)
- Entretenir ses capacités motrices (besoin physique)
B) Amener l’enfant vers une autonomie de plus en plus maîtrisée
- Quand nous laissons l’enfant faire seul (s’habiller seul, faire ses lacets seul, ranger ses affaires seul, se laver seul,
se brosser les dents seul…), on l’aide à exercer ses fonctions exécutives.
- Il n’y a que lui, par sa propre activité, qui puisse construire son intelligence exécutive.
L’adulte ne peut que l’encourager, dès 3 ans, à faire lui-même ce qu’il peut faire lui-même, en l’accompagnant sans faire à
sa place, en l’encourageant, puis en s’effaçant progressivement.
(source : Céline Alvarez Les fonctions exécutives, 3 compétences clés)
C) Fixer des objectifs et des défis à l’enfant
- L’objectif doit être atteignable (ni trop facile, ni trop dur). Il doit avoir un sens pour l’enfant (aider les autres, exercer
son intelligence, répondre à son besoin d’appartenance et d’utilité).
- Il doit atteindre un objectif précis et pour cela il doit focaliser son attention, contrôler les gestes ou les émotions
inappropriées, planifier ses actions, et rester flexible en cas d’erreur.
(source : Céline Alvarez Les fonctions exécutives, 3 compétences clés)
- Par exemple, cela peut passer par le fait d’aider un plus petit, par le fait d’aider à la cuisine ou à étendre le linge,
de prendre soin d’un animal, de faire une action en un temps plus court que la fois précédente (la compétition se fait contre
sa meilleure performance)…
- Les devinettes sont aussi des bons moyens de poser des défis à l’intelligence de l’enfant.
D) Encourager l’enfant et croire en lui
On pourra lui répéter ces phrases pour renforcer sa confiance en lui :
- Tu n’as pas échoué tant que tu continues à essayer.
- Tu as eu le courage d’essayer et de prendre le risque de te tromper.
- Etre imparfait ne signifie pas être nul.
- La joie n’est pas l’inverse du sérieux : tu peux prendre du plaisir tout en travaillant dur.
- Ce qui t’apparaît impossible devient possible quand tu continues à essayer.
- Je crois en toi.
- Tu en es capable : peut-être pas aujourd’hui ni demain… mais d’une manière ou d’une autre, tu vas y arriver.
- Je t’aime inconditionnellement parce que tu es toi.
- Je t’aime tel que tu es.
- Tu es une partie essentielle et indispensable d’un tout.
- Tu es unique et spécial.
- C’était dur et cela représentait un vrai défi. Et tu as l’as fait, tu as réussi !
- Mets ton coeur dans tout ce que tu fais.
- Ce qu’on fait avec amour et joie réussit toujours.
- Ne laisse jamais rien t’arrêter.
- Tu es capable de réaliser bien plus que ce que tu crois.
E) Engager l’enfant dans des activités sportives et/ou artistiques
Le Dr Adele Diamond insiste sur l’importance des activités artistiques ou sportives dans le développement des fonctions
exécutives.
- Quand ces activités sont menées de la « bonne manière », elle comblent les 3 besoins fondamentaux : joie, connexion, mouvement.
- Pratiquer des activités comme le cirque, la chorale ou l’orchestre, la danse chorégraphiée qui requièrent toutes un
fonctionnement d’ensemble et un aspect de création.
Chaque personne est un rouage indispensable du groupe, chaque membre s’encourage en vue d’une réalisation collective,
sans compétition mais juste avec le plaisir de partager un bon moment, d’exercer son autonomie, de prendre du plaisir.
F) Jouer
Cela peut passer par des jeux libres ou par des jeux orientés.
G) Entraîner la capacité de concentration
- Coloriage ...
H) Entraîner l’enfant à exercer ses compétences relationnelles
- Aller au parc rencontrer d’autres enfants.
- Inviter ses camarades de classe.
I) Fournir un environnement favorable à la créativité
- Une photo, une image, un livre.
- Un objet naturel (une pomme de pin, une fleur...)
- Un concept (le passage d’une saison à une autre, un changement de lumière)
- Du matériel connu disposé de manière inattendue.
- Une réponse à un centre d’intérêt de l’enfant
- Un objet (par exemple, une carte, un tournevis...)
- De nouveaux moyens créatifs (des pinceaux plus ou moins gros que d’habitude, des pailles pour peindre en soufflant, un
appareil photo...)
- Une question à explorer (par exemple, qu’est-ce que la gravité ?)
- Un événement (le début des vacances, un mariage…)
J) Prendre le temps d’expliquer
K) Limiter les écrans
3) Développement des Fonctions exécutives chez l'enfant
- La période préscolaire s’avère particulièrement sensible pour le développement des Fonctions Exécutives.
Certaines études ont observé :
- Une amélioration graduelle des habiletés d’inhibition est observable jusqu’à l’âge de 5 ans (Garon, Bryson, & Smith 2008)
- La flexibilité mentale et la planification se développent très vite entre 3 et 5 ans (Atance & O’Neill, 2001).
- Des chercheurs (Zelazo, 2013) rapportent que la période de 3 à 7 ans s’avère importante dans le développement
des Fonctions exécutives mais nous en savons actuellement peu sur les facteurs qui les influencent.
A) Le statut particulier du lobe frontal dans le cerveau en développement
- Les structures cérébrales frontales chez l’humain font preuve d’une maturité particulièrement tardive.
- La maturation du cortex préfrontal est plus tardive que celle des autres régions du cerveau :
élimination synaptique et une myélinisation plus lentes, qui se prolongent jusqu’au début de l’âge adulte au moins.
- Par ailleurs, si la taille et le poids du cerveau des hominidés ont considérablement augmenté en l’espace de six millions
d’années, le développement du cortex préfrontal a été proportionnellement nettement plus important.
- Plusieurs particularités évolutives ont été identifiées chez l’être humain :
Une taille accrue de certaines zones d’association multimodale et une augmentation de la substance blanche préfrontale.
En permettant une amélioration de la transmission neuronale et de la connectivité, ces particularités seraient à l’origine
des progrès spectaculaires de notre espèce dans le traitement de l’information et les apprentissages.
- Si la maturation des lobes frontaux et des Fonctions exécutives est tardive, leur développement mutuel est précoce et
rapide, dès les premiers mois de la vie.
B) L’interdépendance des différentes Fonctions exécutives
- Des calendriers développementaux différents semblent caractériser ces fonctions, avec de surcroît des trajectoires
contradictoires d’une étude à l’autre.
- Le lien avec le traitement et la régulation des émotions, l’empathie ou la prise de décision affective reste peu étudiée.
Cela représente un enjeu majeur pour la compréhension de l’émergence de la cognition sociale et des concepts associés
comme la théorie de l’esprit ou la résolution de problèmes sociaux.
- L’environnement socioculturel des enfants et en particulier le niveau d’éducation des parents semblent jouer un
rôle essentiel sur le développement des Fonctions exécutives en particulier pour les épreuves verbales.
C) Théorie
Une intégration théorique des différentes connaissances
a récemment été proposée.
Cette proposition met en évidence :
a) Le rôle essentiel du cortex préfrontal
Il consiste à associer l’ensemble des informations issues des cinq sens pour l’amener dans le domaine de l’action possible.
b) L’organisation fonctionnelle du cortex préfrontal
- Elle permet l’établissement de représentations liées entre elles.
- La formation et le contrôle des représentations s’effectuent grâce à des
ressources de traitement.
Les ressources de traitement sont la Mémoire de travail et le contrôle inhibiteur.
c) Les représentations
Les représentations seraient des structures de savoir ayant pour fonction d’assurer :
- Le lien temporel (entre passé et futur, à l’origine de la mémoire autobiographique et prospective, ainsi que de la
planification),
- Le lien de la pensée (entre les autres et soi, renvoyant à la métacognition et à la théorie de l’esprit)
- Le lien émotionnel (entre affect et pensée, favorisant la prise de décision affective, la régulation des émotions et la
communication de messages socio-affectifs).
Les représentations sont sous la dépendance des régions orbitaires et ventromédianes.
d) Les fonctions dévolues au cortex préfrontal
Les fonctions dévolues au cortex préfrontal se développeraient graduellement :
les éléments clés sont présents tôt dans la vie avant d’être reconfigurés
tout au long de l’enfance.
Extraits de la revue de neuropsychologie neurosciences cognitives et cliniques
2012
III) PATHOLOGIES COMPROMETTANT LES FONCTIONS EXECUTIVES
1) Pathologies neuropsychologiques
Accident vasculaire cérébral |
Infarctus artériel |
cérébrale moyenne ( territoire antérieur et profond) |
|
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cérébrale antérieur |
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thalamus (territoire paramédian) |
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|
infarctus veineux : sinus sagittal supérieur |
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|
rupture d'anévrysme : communicante antérieure et péricalleuse |
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|
hémorragie : lobe frontal, striatum et thalamus |
Autres lésions focales |
tumeurs, abcès |
|
Démences |
Démence vasculaire |
|
|
Démence sous-corticale (Paralysie supranucléaire progressive, maladie Huntington, maladie Parkinson) |
|
|
Démence fronto-temporale |
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|
Dégénérescence corticobasale |
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|
Maladie d'Alzheimer |
|
Traumatisme crânien grave |
|
|
Etiologies inflammatoires |
|
|
Hydrocéphalie |
|
|
Encéphalopathie alcoolique |
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|
Neuropsychologie de l'attention.J.Couillet et coll. Editions Solal. P177
2) Pathologies psychiatriques
- Schizophrénie
- Troubles obsessionnels compulsifs
- Dépression
3) Autres troubles
- Autisme et troubles du spectre autistique
- TDA/H : Trouble déficitaire de l'attention avec ou sans hyperactivité.
4) Incidences des atteintes des fonctions exécutives
Les fonctions exécutives sont indispensables à l'adaptation à notre environnement et à la vie en société, aux apprentissages.
Des atteintes des fonctions exécutives ont des incidences dans :
Les troubles instrumentaux
- Le langage
Les troubles cognitifs
- La mémoire - L'attention
Les troubles psychocomportementaux
- Persévérations - Distractibilité - Echolalie - Temps de latence - Confabulations
Les troubles moteurs
- Négligence motrice - Gestes stéréotypés - Persévérations motrices - Comportement d'imitation
Les troubles de l'humeur
- Désintérêt - Euphorie - Jovialité - Irritabilité - Agressivité - Hyperactivité - Dépendance
environnementale
Troubles des conduites sociales
L'évaluation et la rééducation de ces troubles sont effectuées par des orthophonistes et des neuropsychologues.
Le cerveau. Planche issue du Dictionnaire d'Orthophonie